Lapè Pou Ayiti s’implante dans le Sud : une mobilisation populaire contre l’ordre établi
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Lapè Pou Ayiti s’implante dans le Sud : une mobilisation populaire contre l’ordre établi
Par Valescot Wilgins
PORT-SALUT, 20 JUILLET 2025-.
Ce week-end, l’organisation politique Lapè Pou Ayiti a officiellement lancé ses activités dans le département du Sud. Ce mouvement, né de la volonté de représenter les strates populaires exclues du pouvoir, affirme son ambition d’établir une alternative politique véritablement haïtienne. Suite à un lancement marquant à Port-au-Prince le 17 juin dernier, cette étape régionale constitue un tournant stratégique dans la structuration de son territoire.
Lors d’un discours empreint d’énergie et ancré dans la réalité sociale, Jean Fritznel Pierre Louis, leader du mouvement, a clairement dénoncé l’abandon du Sud par les autorités:
« Le Sud, à l’instar d’autres régions du pays, est régulièrement négligé. Les infrastructures sont en piteux état, les routes impraticables, et les habitants se retrouvent abandonnés à eux-mêmes. Nous ne pouvions pas initier le mouvement Lapè Pou Ayiti uniquement à Port-au-Prince. Ce mouvement a pour vocation de faire entendre la voix de ceux qui sont rarement médiatisés, qui n’ont jamais l’occasion de participer aux négociations politiques, mais qui subissent quotidiennement les répercussions du désordre. »
En évoquant le parcours ardu des militants pour atteindre le lieu de lancement, il a souligné l’ampleur de la dégradation des conditions :
« Pour parcourir quelques dizaines de kilomètres, il faut parfois trois à quatre heures, voire plus. Les routes sont bloquées et l’insécurité règne en maître. Martissant est devenu un obstacle qui fracture la capitale du reste du pays. Nous ne pouvons envisager la paix ni le développement tant que ces conditions inacceptables perdurent. »
Au-delà de la dénonciation, son appel vise à mobiliser :
« Lapè Pou Ayiti représente l’organisation des laissés-pour-compte, des travailleurs, des étudiants, des agriculteurs, des femmes et des jeunes sans avenir. Il ne s’agit pas d’une initiative imposée d’en haut, mais d’une exigence portée par les masses. Nous invitons chacun à sortir de l’apathie, à ouvrir les yeux et à se lever pour exprimer un refus. Ce système ne s’effondrera pas de lui-même. Il ne chutera que si nous l’attaquons collectivement, avec organisation, stratégie et solidarité. »
Nélus Néruis, militant engagé au sein de l’organisation, a prononcé une déclaration touchante qui exprime la frustration d’une grande partie de la population envers le système politique en place :
« Depuis l’assassinat de Jovenel Moïse, le paysage politique demeure inchangé, avec les mêmes visages, les mêmes familles influentes et les mêmes groupes de pouvoir qui se répartissent les responsabilités. Pendant ce temps, la majorité des citoyens endure des souffrances, fuit le pays ou meurt dans l’indifférence générale. Cinq tentatives de transition ont été menées en moins de quatre ans, toujours dans le même objectif : préserver les intérêts d’une minorité. »
Il a directement interpellé la classe politique traditionnelle :
« Alors que vous perdez un proche dans un quartier touché par la violence, tandis que vous tentez de fuir l’insécurité, ces individus s’enrichissent. Ils attendent les prochaines élections pour revenir avec des sommes d’argent considérables afin d’acheter votre silence, votre colère, vos votes. Cependant, cette fois-ci, nous ne les laisserons pas agir ainsi. Nous devons nous rassembler autour d’une seule direction et d’une stratégie unifiée. »
Pour lui, Lapè Pou Ayiti constitue la seule voie crédible :
« Ce n’est pas un parti d’élite, mais une véritable force de terrain. Nous ne cherchons pas à négocier des postes, mais à transformer l’histoire. L’État n’appartient pas à ceux qui en usurpent le contrôle. Il doit redevenir un outil au service du bien public. Nous appelons tous les citoyens conscients à rejeter les illusions, à développer leur formation politique et à se rallier à ce front de libération sociale. »
Les deux intervenants ont souligné l’importance d’éviter toute forme de résignation qui pourrait s’avérer destructrice. Ils transmettent un appel au réveil citoyen, à une prise de conscience collective et à une mobilisation urgente en vue de sortir d’un cycle de chaos entretenu.
Jean Fritznel Pierre Louis a déclaré :
« Il est inacceptable de poursuivre notre existence dans de telles conditions de précarité. Le peuple ne recherche pas la compassion, mais la capacité d’agir. Ce que nous initiions aujourd’hui dans le Sud représente une révolution d’ordre moral, politique et social. Ce combat ne fait que débuter et se poursuivra, qu’il implique ou non les anciens politiciens. »
Dans une société haïtienne historiquement dominée par Port-au-Prince, le déploiement de Lapè Pou Ayiti dans la région sud revêt une dimension stratégique. Ce projet vise à rétablir un équilibre du pouvoir citoyen à partir des territoires négligés, dans un contexte où il existe une rupture complète entre les institutions et la réalité vécue par la population.
Ce mouvement traduit une nécessité urgente de réinventer la démocratie haïtienne en s’appuyant sur de nouveaux fondements : une participation authentique, la justice sociale, l’égalité des territoires et la souveraineté populaire.
Dans les semaines à venir, des forums communautaires, des assemblées populaires et des cellules d’organisation citoyenne seront instaurés dans l’ensemble du Grand Sud, suivis d’une expansion vers l’Artibonite et le Nord-Ouest. Par ailleurs, une convention nationale est prévue avant la fin de l’année.
wilgens.v09@gmail.com