Haïti : L’absence du CNE plonge les marchés dans l’insalubrité – marché de Pétion-Ville devenu dépotoir à ciel ouvert
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Haïti : L’absence du CNE plonge les marchés dans l’insalubrité – marché de Pétion-Ville devenu dépotoir à ciel ouvert
30 avril 2025, Pétion-Ville –
La situation devient alarmante au marché communal de Pétion-Ville. Ce mardi matin, les cris des marchandes ont rompu le silence habituel du centre-ville. Fatiguées de cohabiter avec des montagnes de détritus qui s’accumulent depuis des semaines, elles ont lancé un cri d’alarme en direction du maire Kesner Normil, lui demandant d’intervenir de toute urgence.
Une équipe de RÉALITÉ INFO s’est rendue sur place pour un micro-trottoir exclusif, donnant la parole à ces femmes qui subissent au quotidien les conséquences de l’inaction des autorités.
Cette scène n’est pas isolée. Elle illustre un phénomène généralisé à travers le pays depuis le dysfonctionnement du Centre National des Équipements (CNE), une institution jadis indispensable dans la gestion des déchets. Jadis pilier logistique de l’État, le CNE assurait quotidiennement l’enlèvement de tonnes d’immondices dans les marchés publics, les axes routiers et les quartiers populaires. Mais depuis le décret pris par l’ancien Premier ministre Garry Conille, qui a profondément restructuré voire désarticulé le fonctionnement du Centre, les conséquences se font cruellement sentir dans les communes les plus vulnérables.
Le CNE disposait pourtant d’une équipe complète composée de techniciens, d’ingénieurs, de topographes, de spécialistes en communication, de mécaniciens, mobilisés pour mener à bien des projets d’intérêt national. Le Centre National des Équipements construisait également des routes nationales, des barrages pour l’irrigation des jardins, et contribuait activement au développement rural. Depuis sa suppression, aucun employé n’a reçu son chèque depuis huit mois, et contrairement à ce que prévoyait le décret, aucun transfert de ces employés vers d’autres institutions étatiques n’a été effectué. Cette situation aggrave non seulement les conditions de vie du personnel concerné, mais accentue aussi l’effondrement des services publics de base.
À Pétion-Ville, les commerçantes dénoncent une situation qui devient invivable. « Fatra ap taye banda nan mache a, nou pa ka vann manje konsa, » déclare une vendeuse, visiblement dépassée. Un autre groupe de marchandes a exprimé son désarroi : « Nou pa ka kontinye konsa. Se sante nou ki an danje. »
L’importance du CNE allait bien au-delà du simple ramassage d’ordures. Avec son parc de machineries lourdes, l’institution jouait également un rôle clé dans le dégagement des voies après les intempéries, le curage des canaux et l’entretien des infrastructures rurales. En supprimant ou en affaiblissant ce dispositif, les autorités ont fragilisé l’un des rares leviers opérationnels de l’État dans la gestion de l’espace public.
Avant cette décision controversée, le CNE ramassait quotidiennement des tonnes de détritus, nettoyait les canaux, désencombrait les routes, et soutenait les communes dans les situations d’urgence environnementale.
Aujourd’hui, face à l’inaction, les citoyens s’interrogent. Pourquoi une telle décision a-t-elle été prise sans alternative solide ? Pourquoi les communes comme Pétion-Ville doivent-elles payer le prix fort d’une réforme mal planifiée ?
L’appel des marchandes doit être entendu. Le retour d’une structure nationale de gestion des équipements et de propreté, comme l’était le CNE, semble désormais indispensable. À défaut, c’est la santé publique, la dignité des marchands et l’image même des villes haïtiennes qui continueront de se dégrader.
Aujourd’hui, Pétion-Ville n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. L’absence de cette institution a provoqué un vide logistique que ni les mairies ni d’autres structures n’arrivent à combler. Et ce sont les plus vulnérables — les petits commerçants, les riverains, les écoliers — qui en paient le prix fort.
À travers ce micro-trottoir, RÉALITÉ INFO donne la parole à une population laissée pour compte, et relance le débat sur la nécessité d’un dispositif nationa solide pour gérer les infrastructures de base. Le retour ou la refonte du CNE est désormais un enjeu sanitaire et social de premier ordre.
La rédaction.
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