Drones explosifs : des opérations sélectives qui protègent les chefs de gangs, Pierre Espérance dénonce un jeu dangereux
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Drones explosifs : des opérations sélectives qui protègent les chefs de gangs, Pierre Espérance dénonce un jeu dangereux
Port-au-Prince, mercredi 11 juin 2025.- C’est une déclaration-choc qui jette un pavé dans la mare de la lutte contre le grand banditisme en Haïti. Selon Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), les opérations de drones explosifs, menées depuis le 1er mars dernier, seraient « sélectives » et orchestrées de façon à « protéger » les chefs de gangs tout en ciblant principalement leurs soldats.
« Aucun chef de gang n’a été tué depuis le début des interventions des forces de l’ordre avec les drones », déplore Pierre Espérance lors d’une interview exclusive accordée à notre rédaction ce mercredi. Pourtant, les chiffres sont spectaculaires : au moins 14 drones ont été largués dans les quartiers de Gran Ravin, Maranatha et Village-de-Dieu entre lundi et mardi, causant la mort d’environ 100 bandits et faisant plus de 150 blessés.
Malgré ces résultats en apparence impressionnants, Pierre Espérance souligne l’absence de toute coordination stratégique entre la Police Nationale d’Haïti (PNH), les Forces Armées d’Haïti (FAD’H) et les forces internationales déployées. « Nous assistons à une théâtralisation des opérations, où l’on neutralise les petits bandits, mais où les chefs restent intouchables. Cela ressemble à une protection organisée », accuse-t-il.
Depuis leur première utilisation en mars 2025, les drones kamikazes, supposés traquer les chefs de gangs, n’ont toujours pas réussi à les atteindre. Selon Espérance, cette situation est révélatrice d’une « collusion manifeste entre ceux qui manipulent les drones et les barons du crime organisé ». « Il est anormal, dit-il, que ces drones identifient précisément les bastions des chefs de gangs, mais qu’ils s’abstiennent de frapper là où cela dérangerait vraiment. »
En avril, plusieurs rencontres de haut niveau avaient pourtant été organisées pour « améliorer la coordination et la gestion efficace des drones ». Pourtant, déplore Espérance, « aucune de ces décisions n’a été appliquée à ce jour » et les opérations restent « sélectives et inefficaces », laissant la population et les policiers en première ligne face aux représailles.
Pierre Espérance n’épargne pas non plus les responsables de la communication officielle : « Quand les bilans sont présentés, ils omettent systématiquement le rôle des drones et le nombre réel de chefs de gangs encore en liberté », dénonce-t-il. Selon lui, le porte-parole Michel-Ange Louis Jeune privilégie « une communication fermée et sélective avec des médias choisis », excluant ainsi toute transparence sur la véritable efficacité des drones dans la lutte contre l’insécurité.
Depuis le 1er mars, le RNDDH recense plus de 300 morts et 400 blessés parmi les bandits lors des opérations de drones, mais aucun chef de gang n’a été éliminé. Une situation inacceptable pour Espérance : « Nous ne pouvons pas accepter que des drones, censés être un outil décisif pour rétablir l’ordre, soient détournés pour protéger ceux-là mêmes qui terrorisent la population. »
En conclusion, Pierre Espérance appelle à « une prise de conscience immédiate » des autorités et des partenaires internationaux pour rétablir la crédibilité des opérations de drones, et exige des explications sur la stratégie réelle qui, jusqu’ici, « épargne les véritables cibles ».
La rédaction.
