ÉDITORIAL – Haïti : jusqu’à quand allons-nous confier notre sécurité à ceux qui profitent de notre faiblesse ?
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Une nouvelle mission internationale est de nouveau déployée sur le sol haïtien. La Force de Répression des Gangs (FRG), qui compte 5 500 membres, a officiellement pris le relais de la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité (MMAS). D’après la déclaration diffusée sur le compte officiel X de l’ambassade américaine, cette force opère « en vertu de la résolution 2793 (2025) des Nations Unies », en collaboration avec la Police nationale d’Haïti (PNH) et les Forces armées d’Haïti (FAd’H). Son objectif est de lutter contre les gangs, de protéger les infrastructures et de soutenir les efforts de stabilisation du pays.
Cependant, une question essentielle se pose : que demeure-t-il, après plus de trente ans, des nombreuses missions des Nations Unies qui se sont succédé en Haïti ? De la MINUHA à la MINUSTAH, en passant par la MINUJUSTH et la BINUH, toutes avaient engagé leur parole en faveur de la sécurité, de la stabilité et de la reconstruction des institutions. Force est de constater que les résultats sont révélateurs : un État davantage fragilisé, des structures nationales affaiblies et une dépendance accrue envers l’international.
L’histoire de l’ONU en Haïti ne peut être considérée comme un succès humanitaire, mais plutôt comme une série d’échecs. La MINUSTAH a laissé un héritage douloureux : l’épidémie de choléra, qui a causé la mort de plus de 10 000 Haïtiens, ainsi que de nombreuses victimes d’abus sexuels perpétrés par des soldats attribués à des missions de protection. Ces crimes, qui n’ont jamais été entièrement réparés, ont durablement entaché la crédibilité des interventions internationales dans le pays.
Pourquoi ces prétendus « pays amis » d’Haïti ne s’engagent-ils pas à investir directement dans la Police nationale et les Forces armées haïtiennes ? Pourquoi choisir de débourser des millions pour soutenir des contingents étrangers plutôt que de consacrer ces fonds à l’équipement et à la professionnalisation de nos forces nationales ?
La réponse, bien que simple, est préoccupante : ces puissances ne souhaitent pas voir émerger une Haïti forte. Elles ne financeront jamais une armée moderne et disciplinée, car une telle institution constituerait un frein à leurs intérêts économiques et politiques. Une armée bien équipée serait en mesure d’endiguer l’exploitation silencieuse de nos ressources naturelles et de mettre un terme à la domination étrangère sur nos richesses.
C’est cette même logique de dépendance qui a entraîné la privatisation contrainte de nombreuses entreprises publiques en Haïti durant l’administration du président René Garcia Préval. Cette décision, prise sous la pression des bailleurs de fonds internationaux, a conduit à la désintégration de la production nationale et a facilité l’accès à la domination économique étrangère.
Depuis lors, la vulnérabilité institutionnelle d’Haïti est régulièrement invoquée comme un prétexte pratique pour justifier les interventions successives. Bien que l’on évoque des initiatives de « stabilisation », on observe une continuité dans le processus : une mission succède à une autre, sans obtenir de résultats durables, sans transfert de compétences, et sans tenir compte du respect de la souveraineté nationale.
En ce jour, la FRG continue de se positionner comme une réponse pertinente. Cependant, la stabilité ne s’improvise pas ; elle se construit. Celle-ci repose sur la confiance envers nos propres institutions, sur le renforcement de nos capacités nationales et sur la volonté politique de réaffirmer notre contrôle sur notre territoire.
Haïti ne nécessite pas d’une nouvelle occupation masquer sous le prétexte d’une mission humanitaire. Haïti appelle à des partenariats authentiques, en mesure de soutenir son armée, sa police, son économie et sa souveraineté.
En effet, un pays dépourvu de défense nationale est un pays sans avenir. Tant que nous continuerons à déléguer notre sécurité à ceux qui tirent parti de notre vulnérabilité, nous demeurerons piégés dans un cycle d’humiliation et de dépendance.
Le moment est venu pour Haïti de rejeter l’assistance permanente et d’affirmer sa souveraineté retrouvée. Notre dignité nationale n’a pas de prix et ne saurait être placée sous tutelle.
La rédaction.


